Visite descriptive au musée des Beaux-Arts de Caen du 16 octobre 2021

Cette première visite descriptive de la saison, menée par Adrien, avait pour objet l'exposition "L'école du regard : Caravage et les peintres caravagesques".

L'exposition a été conçue autour de la collection de Roberto Longhi. Au 19e siècle, on avait presque oublié Le Caravage, souvent considéré comme le dernier des maniéristes. Pour Longhi, historien d'art, c'est plutôt le premier des modernes. Il va alors collectionner dès ses 21 ans des œuvres d'art d'inspiration caravagesque.

L'exposition est présentée en 3 temps :

  1. Les inspirations du Caravage, et notamment les artistes maniéristes ;
  2. Le Caravage ;
  3. L'influence du Caravage.

Parmi les inspirations du Caravage, Adrien nous décrit « Les volaillères » de Passarotti (1580). C’est un tableau de 1m20 de long sur 1m de haut. Il représente deux personnages dans une scène de marché. On y voit beaucoup de volatiles.
En suivant le bord inférieur du tableau, au milieu, on découvre un panier en osier plein de poules et de coqs. Un des coqs est sur une des poules.
En remontant le bord gauche, on découvre une table où sont étendues des volailles sur le dos : des canards, des bécasses.
Dans le coin en haut à gauche, d'autres volailles sont suspendues par les pattes.
On note le goût particulier de l'artiste pour la réalisation des plumes.

Dans la moitié supérieure du tableau, on découvre une vendeuse, assise derrière l'étal. Elle tient dans sa main un coq qu'elle regarde en face.
Sur la droite, une seconde volaillère est assise de trois quarts, la jambe relevée pour soutenir la dinde qu'elle est en train de plumer. Elle est assise sur l'étal. Sa chaussure arrive au-dessus du panier en osier. C'est sa jambe droite qui revient vers l'avant.
A droite derrière la seconde volaillère, on trouve une cruche avec un verre de vin posé dessus. Sur le verre, un moineau. En italien le moineau se dit Passarotti, et l'artiste s'appelle passarotti.
Le verre pénètre dans la cruche, et le petit oiseau peut aussi symboliser le sexe masculin.

La vendeuse de gauche regarde le coq, les yeux dans les yeux. On retrouve le rouge de la crête du coq dans la robe de la femme.
La vendeuse de droite a commencé à plumer une dinde. Plus jeune, environ 18 ans, elle est vêtue de bleu vert, assez décolleté. Elle a la jambe croisée, ce qui est considéré comme vulgaire pour l'époque. Et comble de la vulgarité, elle montre le dessous de sa chaussure.

Le peintre utilise la même couleur pour la carnation de la vendeuse et de la dinde, de la robe et du coq.

La scène est aussi une scène de prostitution. La volaillère se vend, puisqu'elle est sur l'étal. Sa vulgarité dénote ce métier. Et La vendeuse qui regarde le coq, est la maquerelle. Le coq symbolise le libidineux.

La robe de la maquerelle est rouge foncé, tandis que le vêtement de la jeune fille est beaucoup plus lumineux. Le reste de la composition est dans des teintes ocre, marron.

Bartolomeo Passarotti vit à Bologne et s'intéresse à Denis Calvaert. Or Calvaert peint des scènes de vie quotidienne, souvent grotesques, typiques des pays bas (pays de Calvaert).

Passarotti a fait 4 volets : les volailles pour l'air, les poissons pour l'eau, les légumes pour la terre et la rôtisserie pour le feu.

Caravage a sûrement connu les œuvres de Passarotti puisqu'ils avaient le même mécène.

Ce qui dénote le maniérisme, c'est la perspective. Celle-ci n'est pas clairement définie. En outre, on voit des jeux autour de la serpentine, des formes de S qui apparaissent dans le tableau. Passarotti a un naturalisme qu'il va piocher chez Calvaert, mêlé à du maniérisme par la caricature.
Ici, contrairement au Caravage, les jeux de lumière ne sont pas encore définis.
On voit apparaître le travail de naturalisme, ainsi que le travail autour des gens du peuple.

A la fin de la renaissance, on disait que les artistes peignaient à la manière de... soit de Raphaël, soit de Michel-Ange. Mais en fait ce n'est pas du tout le cas. Les artistes vont essayer de nouvelles techniques, comme la peinture à l'huile.
A Florence on peignait à la tempera, peinture à base d'œuf. Mais on ne pouvait pas superposer plusieurs couches. En outre cette peinture avait tendance à pourrir à Venise avec l'humidité. C'est ainsi que s'est développée la peinture à l'huile.

Adrien nous présente ensuite le Saint Thomas de Jusepe (ou José) de Ribera. Pour que nous puissions nous en faire une idée, il a composé une représentation tactile avec des papiers de textures différentes.

L’œuvre représente Saint Thomas debout de profile qui tient une lance. Autour de lui un vêtement tout en drapé, et sous ce drapé une chemise.
Les rayons lumineux partent d'en haut à gauche, en descendant vers la droite.

Le personnage est de profile, contre un mur. Il est très statique, regardant droit devant lui. Mais le drapé de son vêtement donne une impression de mouvement.
Le fonds du tableau est gris, clair en haut, et plus foncé en descendant.
Il semble que la lumière qui éclaire le saint arrive en douceur, de biais.
Par ailleurs, une autre lumière éclaire son visage de manière plus vive.

C'est un jeune garçon, qui n'a rien de saint. Il n'est pas idéalisé, réalisé à l'échelle une.
C'est une peinture très moderne, avec un fond sobre, une lumière très forte, et un Saint qui semble marcher vers son calvaire, armé de sa lance.

De Ribera (1591 – 1652) est un artiste espagnole qui décide de partir faire carrière à Rome. Il a environ 20 ans quand il réalise ce tableau. Il a demandé à ce qu'on fasse un trou dans son atelier pour que la lumière arrive directement.

Ribera a réalisé un apostolat, c'est-à-dire 12 toiles, commandées par le représentant du commerce espagnol en Italie. Trois des 12 toiles sont présentées au Musée des Beaux-Arts : Saint Philippe, Saint Thomas et Saint Barthélémy.
En 1612, lorsque ce tableau a été réalisé, Le Caravage a déjà laissé la trace de son passage.

Cependant, ce tableau est une forme de clair-obscur mais qui n'est pas le même que Caravage. Ici, Ribera a pris une certaine liberté avec 2 sources lumineuses. Alors que le Caravage veille à être cohérent dans la source lumineuse.

Ribera s'intéresse aux visages et aux drapés. Il est ensuite parti à Naples où il s’est attelé à représenter l'aspect populaire de ses personnages.

Au travers de cette exposition, nous avons pu découvrir les influences du Caravage sur la peinture moderne.

Rédigé par Emmanuelle Gousset, le 12 novembre 2021.

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